
Virginie
LEFÈVRE
Rédactrice Sirenergies
Table des matières
Prolongation de la durée de vie du parc nucléaire : enjeux stratégiques et économiques
November 16, 2023
8
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Auditionné par l’Assemblée nationale en janvier 2023, Cédric Lewandowski, directeur exécutif d’EDF chargé du parc nucléaire et thermique, a levé le tabou en évoquant une prolongation de la vie du parc nucléaire français jusqu’à 80 ans, à l’instar de certains réacteurs américains.
Sans aller aussi loin, EDF et RTE militent depuis plusieurs années pour l’allongement de la durée de vie des réacteurs français jusqu’à 60 ans. Une première marche a été franchie en 2021. L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a donné un avis favorable pour prolonger jusqu’à 50 ans l’exploitation de 32 réacteurs de 900 MW, sous conditions d’améliorations de sûreté. Sur la question des 60 ans, le gendarme du nucléaire invite à la prudence, dans l’attente des justifications d’EDF.
50 ans ? 60 ans ? 80 ans ? Quelle que soit la durée, la prolongation de la vie des centrales existantes fait polémique, opposant fervents défenseurs et détracteurs de l’énergie nucléaire.
Quel est l’état des lieux du parc nucléaire français aujourd’hui ? Pourquoi prolonger sa durée de vie ? Quels sont les avantages et les défis que soulève cette perspective ? Dépassionnons le débat.
54 %. C’est le taux de disponibilité du parc nucléaire en 2022, annoncé par le gestionnaire du réseau de transport d’électricité RTE dans son bilan annuel publié en février 2023. C’est un chiffre historiquement bas, en comparaison aux 73 % de disponibilité moyenne observée entre 2015 et 2019.
En cause ? La mise à l’arrêt de nombreux réacteurs pour des opérations de maintenance, des défaillances techniques ou des problèmes de corrosion. Au plus bas de la production, à l’été 2022, 32 réacteurs étaient à l’arrêt sur les 56 que compte le parc nucléaire français.
EDF rattrape aujourd’hui son retard dans la réalisation des travaux de maintenance, retardés par la crise sanitaire. La production a repris progressivement cet hiver pour atteindre 25,3 TWh en mars 2023. Mais elle reste fragilisée par le vieillissement du parc nucléaire et les problèmes de corrosion identifiés sur certains systèmes de sécurité et de refroidissement des réacteurs.
En France, la loi ne fixe pas de limite d’âge pour les centrales nucléaires. Elles ont été conçues pour une durée d’exploitation minimale annoncée de 40 ans.
Si l’on en croit ce chiffre, les 37 réacteurs mis en service entre 1976 et 1985 suite au choc pétrolier arrivent au terme de leur durée d’exploitation. Mais les progrès techniques permettent de faire sauter cette barrière des 40 ans. Selon EDF, « Aujourd'hui, le grand consensus scientifique, technique et économique est que notre parc est adapté pour aller à 60 ans ». C’est ce que l’énergéticien national doit aujourd’hui prouver.
En attendant, un premier consensus semble se dessiner avec la prolongation de la durée de vie du parc nucléaire jusqu’à 50 ans. L’accord a d’ores et déjà été donné en 2021 par l’ASN pour les petits réacteurs de 900 MW. Les études sont en cours pour l’allongement éventuel à 50 ans de l’exploitation des réacteurs de 1 300 MW.
Sur fond de guerre en Ukraine, l’année 2022 a été marquée par une crise énergétique, qualifiée par RTE « d’inédite depuis les chocs pétroliers des années 1970 ». Elle a mis en valeur l’insécurité énergétique des pays européens, ébranlés par les problèmes d’approvisionnement et l’envol des prix de l’énergie.
Dans cet environnement instable, la France a réussi à garantir la sécurité de ses approvisionnements énergétiques et à amortir la hausse des coûts de l’électricité. La raison ? Sa production nucléaire. Malgré une baisse marquée en 2022, elle a représenté 63 % de la production totale nationale d’électricité.
Comme l’affirme le rapport de la commission d’enquête publié fin mars 2023 portant sur la souveraineté énergétique nationale, l’énergie nucléaire reste le « pilier de notre production et de notre souveraineté électrique ».
Indépendance énergétique, maîtrise des coûts de l’énergie, décarbonation de l’énergie : les enjeux économiques et écologiques sont forts. Le nucléaire aide à y répondre. Face aux coûts et délais de construction de nouvelles centrales, la prolongation de la durée de vie du parc nucléaire offre une solution alternative pragmatique et sécurisée.
Le choix du nucléaire permet de maîtriser les coûts de l’énergie en France.
En pleine crise énergétique, le prix de l’électricité en France reste plus faible que dans le reste de l’Europe. Alors qu’il dépasse les 50 c€/kWh au Royaume-Uni, en Italie et en Belgique – et même les 60 c€/kWh en Allemagne –, le prix de l’électricité plafonne à 24,5 c€/kWh en France grâce au bouclier tarifaire. Mais même sans ce soutien de l’État, il resterait inférieur au prix observé dans les autres pays européens, à 42,4 c€/kWh.
Cette exception française s’explique par la compétitivité de la production nucléaire. Selon la Société française d’énergie nucléaire (SFEN), avec la prolongation de la durée de vie du nucléaire à 50 ans, le coût de la production nucléaire est estimé à 40 €/MWh. En comparaison, la production d’électricité à partir d’une centrale au gaz représente entre 90 et 130 €/MWh.
L’énergie nucléaire produit une électricité décarbonée. C’est un atout pour la transition énergétique dans un contexte de réchauffement climatique où il devient urgent de réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), le kWh nucléaire émet 6 g de CO₂, contre 418 g de CO₂ pour les centrales à gaz et 1 058 g de CO₂ pour les centrales à charbon. Même les énergies renouvelables émettent plus de gaz à effet de serre, avec 10 g de CO₂ pour l’éolien et 30 g pour le solaire photovoltaïque.
La guerre en Ukraine et les tensions sur les approvisionnements en électricité et en gaz l’ont prouvé : l’Union européenne est dépendante sur le plan énergétique.
En 2020, le taux de dépendance moyen de l’Union européenne s’établissait à 57,5 % selon les statistiques Eurostat. Grâce à l’énergie nucléaire, la France affichait un des taux de dépendance énergétique les plus bas d’Europe, à 44,4 %. En comparaison, il était de 63,7 % en Allemagne, 68 % aux Pays-Bas et en Espagne, ou encore 73,4 % en Italie.
Si les signaux inquiètent aujourd’hui quant à la souveraineté énergétique de la France, l’électricité nucléaire participe à sa sauvegarde.
Prolonger la vie du parc nucléaire pose cependant des questions légitimes. Le défi à relever ? Rassurer sur la sécurité et les coûts pour favoriser l’acceptation sociale de cette énergie qui enflamme les débats.
Les images des dramatiques accidents nucléaires de Tchernobyl et de Fukushima restent gravées dans les mémoires. Selon l’échelle internationale des événements nucléaires, 16 accidents se sont produits depuis 1959.
Les incidents sont rares grâce aux réglementations renforcées sur la sécurité et la sûreté nucléaires. En France, c’est l’ASN qui est investie de cette mission à forte responsabilité. Cette autorité administrative contrôle l’état de sécurité des centrales nucléaires et donne son accord aux autorisations d’exploitation.
L’accord pour prolonger la durée de vie à 50 ans des réacteurs de 900 MW est assorti du respect d’obligations sécuritaires afin de « porter la sûreté des réacteurs en exploitation à un niveau proche de celui des réacteurs de troisième génération, type EPR ».
La sécurité est au cœur du programme Grand Carénage qu’EDF a engagé dès 2014. Les travaux portent sur la rénovation et le remplacement des composants arrivant en fin de vie technique, les modifications nécessaires pour améliorer la sûreté et la garantie de la pérennité de la qualification des matériels après 40 ans.
Parmi les améliorations de sécurité à apporter, l’ASN a ciblé trois objectifs :
Les opposants à la prolongation de vie des réacteurs nucléaires pointent les coûts colossaux des rénovations. Ils n’ont pas tort. L’investissement coûte cher.
Le chantier Grand Carénage d’EDF est évalué à 50 milliards d’euros jusqu’en 2025. L’allongement de l’exploitation des centrales existantes à 60 ans a été évalué à 100 milliards d’euros par la Cour des comptes en 2016.
Ces montants sont à comparer avec les coûts et délais de construction de nouvelles centrales nucléaires. Le prix de la construction de trois paires d’EPR2 (soit six réacteurs) est estimé à 52 milliards d’euros sur une durée de 25 ans. Un petit réacteur modulaire SMR, plus flexible et rapide à construire, devrait coûter entre 100 millions et 1,5 milliard d’euros, mais sa puissance est plus faible (entre 10 et 300 MW).
En comparaison, l’investissement pour prolonger la vie du parc nucléaire est un investissement à plus court terme, moins risqué et amortissable grâce au faible coût de production de l’électricité nucléaire.
Malgré ses atouts, le nucléaire se heurte au défi de l’acceptabilité sociale. Au-delà des questions de sécurité et de financement des centrales, l’énergie nucléaire soulève d’autres débats légitimes, dont la gestion des déchets radioactifs et l’importation de l’uranium.
Aucun système énergétique ne propose aujourd’hui de solution idéale. Aucun ne remplit tous les critères de l’acceptation sociale. La question n’est pas aujourd’hui d’opposer l’énergie nucléaire aux énergies renouvelables. La stratégie est de tendre vers un mix énergétique français, assurant à la fois l’indépendance énergétique, la maîtrise des coûts de l’énergie et la neutralité carbone.
Dans ce cadre, prolonger la durée de vie du parc nucléaire peut offrir une solution de transition – certainement discutable –, mais performante à court et moyen terme, amortissable et pilier de la transition énergétique.
Aujourd’hui, les énergies renouvelables sont un complément à la production d’électricité nucléaire. L’idéal à atteindre ? Que la courbe s’inverse progressivement. C’est tout l’enjeu de la stratégie énergétique annoncée en 2022 par le Président Emmanuel Macron, symbolisée par la loi sur l’accélération des énergies renouvelables du 10 mars 2023 et le plan de relance du nucléaire français.
N’hésitez pas à consulter notre article sur : Sécurité nucléaire renforcée : rôle de la Force d'Action Rapide du Nucléaire (FARN)
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