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Virginie

LEFÈVRE

Rédactrice Sirenergies

Experte de l'énergie depuis 15 ans

Conseils & analyses

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Qu’est-ce que l’effacement électrique ?

Comprendre l’énergie
Electricité

Qu’est-ce que l’effacement électrique ?

January 31, 2024

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« Un, deux, trois, éteignons les lumières », lançait Roger Gicquel aux téléspectateurs du journal de 20 h, le jeudi 17 mars 1977, sur TF1. « Qu’est-ce qu’on voit maintenant ? », demande-t-il à Michel Chevalet, présent au même instant au centre de dispatching national : « Eh bien, c’est très net », répond ce dernier, « le bilan pour toute la France en ce moment (… /…) est presque à 175 milliers de kW (175 MW) d’économie d’électricité ».

Par cette expérience menée en temps réel, démonstration était faite aux Français de l’utilité des effacements de consommation sur le système électrique et de l’intérêt d’un système énergétique sobre face à la flambée des prix du pétrole. Chaque téléspectateur présent devant son petit écran ce soir-là a pu se sentir responsable de sa consommation d’énergie.

Pour ceux d’entre vous qui ont éteint des interrupteurs à l’invitation de Roger Gicquel, sachez que vous avez participé à la première expérience d’effacement diffus à grande échelle.

Explication simple de ce qu’est un effacement

Un effacement électrique consiste donc, pour un consommateur, à baisser sa consommation en éteignant des équipements électriques, par exemple un chauffage électrique ou un chauffe-eau, sur signal envoyé par le dispatching du réseau électrique national.

L’objectif de l’opération étant une diminution ou un arrêt à un instant t de l’électricité soutirée sur le réseau durant un laps de temps défini. En contrepartie de son action, le consommateur reçoit une rémunération ou obtient une diminution de son abonnement, ce qui revient au même.

Une pratique mise en œuvre dès la création d’EDF

L’effacement industriel dès 1950 pour piloter un parc majoritairement hydraulique

L’effacement électrique n’est pas une idée nouvelle. Dès les années 50, EDF passe des contrats avec de grands industriels de la métallurgie afin de les inciter à consommer lorsque les centrales hydrauliques produisent plus que de besoin, et à l’inverse à réduire la consommation de leur outil industriel, voire à l’arrêter, lors des pics de consommation. À l’époque, les centrales hydrauliques produisaient 50 % de l’énergie électrique en France.

L’effacement aujourd’hui pour compenser l’intermittence du vent et du soleil

Aujourd’hui, avec le développement des énergies renouvelables, parcs éoliens et centrales photovoltaïques, le système électrique a besoin à nouveau de développer des capacités d’effacement pour faire face à l’intermittence des énergies renouvelables sans faire appel à des centrales thermiques de pointe.

L’enjeu est le développement d’un système énergétique sobre, non pas pour faire face à la flambée des prix du pétrole, mais pour réduire les émissions de CO2 et limiter le changement climatique.

Les tarifs EJP, l’apogée de l’effacement électrique

On distingue essentiellement deux types d’effacement : les effacements industriels et les effacements diffus.

Les premiers, comme indiqué ci-dessus, ont vu le jour dans les années 50 pour compenser l’intermittence des centrales hydrauliques majoritaires sur le parc installé. Les seconds ont été créés en 1965 avec le tarif Tempo d’EDF, qui est un tarif horo-saisonnier de type heures pleines/heures creuses, et développés en 1982 avec les tarifs EJP (Effacement Jours de Pointe), une option des tarifs historiques d’EDF.

À noter qu’à leur apogée, les tarifs EJP avaient permis de contractualiser une capacité effaçable de 6 500 MW grâce à de fortes incitations tarifaires depuis lors révolues.

Un besoin d’effacement renouvelé avec la libéralisation des marchés de l’électricité

RTE, nouveau pilote de l’équilibrage du système électrique

L’ouverture progressive des marchés de l’énergie à la concurrence à partir de février 1999 et la création du gestionnaire du Réseau de Transport d’Électricité, RTE, ont été menées sous l’impulsion de la Commission européenne et de sa directive 2003-54-CE.

RTE a hérité des compétences de dispatching et d’équilibrage du réseau, précédemment assurées par EDF, et a donc eu besoin de pouvoir mobiliser des réserves d’énergie pour piloter le système électrique.

Un nouveau marché : le mécanisme d’ajustement

C’est pourquoi le mécanisme d’ajustement a été créé à cette époque pour permettre à RTE d’acheter de l’énergie à des producteurs ou à de gros consommateurs. Grâce à ce dispositif, RTE achète au jour le jour au mieux-disant les capacités d’énergie nécessaires à l’équilibre production-consommation du réseau.

Avec la fin progressive des tarifs historiques d’EDF et la mise en place de la bourse de l’énergie Powernext en 2001, puis son rachat par EEX en 2008, la valorisation de la production s’est faite essentiellement par la vente d’énergie en MWh.

Le missing money ou comment valoriser les centrales de pointe ?

Est alors apparu le besoin de valoriser les capacités installées de production et non plus seulement de valoriser l’énergie échangée sur les marchés. En effet, avec l’évolution des usages de l’électricité, les pics de consommation d’électricité devenaient de plus en plus importants.

Le 6 février 2012, un record historique est atteint avec 96 291 MW, puis à nouveau le 8 février avec 102 098 MW de puissance soutirée, pour un parc de production installé de 128 680 MW.

Or, dans le même temps, l’absence de rémunération explicite (missing money) des capacités installées a conduit à une baisse des investissements dans les centrales de pointe et donc à une augmentation du risque pour la sécurité du réseau.

En bref : pic de consommation électrique lundi soir

Source : Futura-Sciences

Le marché des capacités d’effacement

C’est pourquoi, en 2008, la Commission Champsaur a été créée pour proposer des évolutions à ces marchés libéralisés de l’électricité. À cette commission participait Jean Bergougnoux, ancien directeur général d’EDF, qui, dans les années 1980, avait eu la responsabilité de créer les tarifs EJP.

C’est ainsi que la Commission a proposé dans son rapport de 2010 la mise en place de nouveaux mécanismes, dont la création d’un marché des capacités d’effacement, qui, après plus de cinq ans de gestation, a vu le jour en 2016.

Les appels d’offres Effacement de RTE

Faire face aux pics de consommation

Pour autant, en 2012, RTE a fait face à de fortes tensions avec quatre pics de consommation de plus de 96 000 MW. Et en conséquence, sans attendre le marché de capacité, RTE a lancé dès l’hiver 2012 des appels d’offres d’effacement de consommation et de production locale, en Bretagne d’abord, puis au niveau national ensuite.

L’objectif pour RTE étant d’accroître les volumes d’offres déposées sur le mécanisme d’ajustement, évoqué précédemment, via des appels d’offres en versant une prime de capacité en €/MW en complément de la rémunération de l’énergie en €/MWh offerte sur le mécanisme d’ajustement.

Les appels d’offres effacement se sont installés dans le paysage énergétique français depuis bientôt 10 ans

Depuis lors, chaque année, RTE organise des appels d’offres pour répondre à ses propres besoins d’équilibrage du système électrique, notamment : l’appel d’offres effacement (AOE), l’appel d’offres réserves rapide et complémentaire (RR/RC).

Il est important de préciser ici que le marché des capacités, quant à lui, adresse l’ensemble du marché et pas seulement le besoin de RTE. En effet, tous les acteurs dits obligés, typiquement les fournisseurs, doivent acquérir ou posséder autant de certificats de capacité que l’exige la réglementation au regard de la consommation d’énergie foisonnée de leurs clients.

Un marché en croissance de 300 % depuis 2020

L’Appel d’Offres Effacement 2022, dont les résultats ont été publiés le 8 novembre dernier, a permis à RTE de contractualiser 2 403 MW. Un volume en forte hausse par rapport aux années précédentes : 1 509 MW en 2021 et 770 MW en 2020. Cette croissance s’explique par la décroissance du parc de centrales thermiques et par la volonté d’accélérer la transition énergétique.

Comment y participer ?

En conclusion, il est à noter que tous les consommateurs, particuliers, professionnels ou très gros consommateurs, peuvent participer à ces appels d’offres organisés par RTE, même ceux connectés aux réseaux publics de distribution.

Le compteur Linky permet notamment aux consommateurs qui en sont équipés de souscrire, chez certains fournisseurs, à des offres adaptées aux effacements de consommation. Pour cela, n’hésitez pas à solliciter SirEnergies qui vous accompagnera pour choisir le meilleur opérateur compte tenu de vos habitudes de consommation.

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Par Emmanuel Sire, co-fondateur de Sirenergies

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Les réponses à vos questions

Quelles taxes concernent particulièrement les industriels ?

L’industrie est concernée par la TICFE, la TICGN et d’autres contributions qui peuvent représenter une part importante des factures. Sirenergies identifie les cas d’exonération et accompagne les démarches pour en bénéficier.

Quel est l’intérêt de suivre les prix Spot & Forward ?

Cela permet de choisir le bon moment pour contractualiser, sécuriser vos budgets et anticiper les hausses.

Comment obtenir une exonération de taxe ?

Certaines entreprises peuvent obtenir une exonération partielle ou totale de la TICFE ou de la TICGN, en fonction de leur activité et de leur intensité énergétique. L’accompagnement d’un expert permet d’identifier les critères d’éligibilité et de monter le dossier.

Que sont les jours d’alerte PP1 et PP2 ?

Ce sont des signaux envoyés par RTE lors des périodes de tension sur le réseau électrique. L’outil Sirenergies vous informe en temps réel pour anticiper vos usages.

Comment lire une facture d’électricité ou de gaz ?

Une facture se compose de plusieurs éléments : consommation, part fournisseur, taxes et contributions. L’analyse de chaque ligne permet d’identifier d’éventuelles erreurs et de vérifier la cohérence avec le contrat signé.

Quelles conséquences d’un dépassement de puissance ?

Un dépassement de puissance entraîne des pénalités financières et peut impacter le dimensionnement du contrat. Ajuster correctement la puissance souscrite permet d’éviter ces coûts supplémentaires.

Quelle différence entre €/MWh et kWh ?

Le €/MWh est une unité de prix utilisée sur les marchés de gros, tandis que le kWh est l’unité visible sur vos factures.

Quelles taxes concernent particulièrement les exploitations agricoles ?

Les exploitations sont soumises à des taxes comme la TICFE ou la TICGN. Sirenergies vérifie leur application, identifie les cas d’exonération et accompagne les démarches pour réduire la charge fiscale.

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