
Virginie
LEFÈVRE
Rédactrice Sirenergies
Table des matières
November 29, 2023
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Aujourd’hui, dans les coulisses de l’Union européenne, les débats font rage en ce qui concerne une nouvelle réglementation. Il s’agit de ce qu’on appelle la taxonomie verte.
Mais de quoi s’agit-il ? Il s’agit tout simplement de la classification des entreprises en fonction de leurs activités. La Commission européenne souhaite ainsi classer les entreprises selon leurs impacts environnementaux.
Il s’agit d’une nouvelle réglementation qui va contraindre l’ensemble des entreprises à publier leurs bilans carbones ainsi que d’autres informations. Cela va permettre de classifier les entreprises selon, notamment, leurs émissions de gaz à effet de serre (CO₂).
Ce n’est pas aujourd’hui une réglementation qui va contraindre financièrement les entreprises qui investissent dans les secteurs polluants. Mais la taxonomie verte va permettre de tracer les investissements dans le monde de l’énergie. L’idée est d’essayer de stimuler les investissements dans les activités qui œuvrent contre le changement climatique.
La finance verte est un phénomène apparu récemment dans le paysage économique français. Il s’agit de l’ensemble des instruments et méthodes visant à diriger les investissements vers des entreprises durables.
La taxonomie verte s’inscrit parfaitement dans cette nouvelle tendance qui va s’installer de manière durable dans l’économie française.
Il s’agit d’un ensemble de mesures adoptées par l’Union européenne en 2020. Ces mesures ont pour but de diriger les investissements et le monde de la finance vers des projets soucieux de l’environnement.
Tout cela fait partie du Pacte vert européen adopté récemment et qui a pour but de faire de l’Europe le premier continent au monde à atteindre la neutralité carbone pour 2050.
C’est un projet ambitieux qui ne peut voir le jour qu’à condition de multiplier les mécanismes incitatifs de la sorte.
Dans ce pacte, on retrouve ainsi un comité d’experts techniques qui s’est penché sur la question des notations financières.
Dans le monde de la finance, il existe un ensemble d’instruments qui permettent de classer les entreprises ou les produits financiers.
Ces notations agissent comme des boussoles et donnent des indications aux investisseurs, en les orientant dans leurs choix financiers. On peut alors imaginer le même système mais avec un classement des activités qui contribuent de façon active à la lutte contre le réchauffement climatique.
La finance tient une part importante dans notre économie. C’est elle qui permet de diriger et de drainer la majorité des investissements à travers un réseau de banques et de différentes institutions financières.
Il est donc important, pour permettre d’atteindre les objectifs du « Fit for 55 », d’y inclure le monde de la finance.
Traditionnellement, c’est le taux de rentabilité qui va diriger les investissements, afin d’en maximiser le profit.
La taxonomie verte permet de rediriger ces flux financiers vers des entreprises qui œuvrent pour l’environnement.
La finance verte est un domaine qui comprend la taxonomie mais qui reste un ensemble beaucoup plus large. Il existe de nombreux produits ou instruments qui œuvrent en ce sens.
Le groupe d’experts techniques désigné par l’Union européenne a fixé des critères de sélection d’activités qui contribuent à l’atténuation et à l’adaptation au changement climatique, comme cela est décrit dans le texte.
Si une entreprise contribue à au moins un de ces critères, elle peut faire son apparition dans ces notations :
À côté de cela, il existe tout un arsenal de mesures visant à estimer de manière correcte l’impact de ces entreprises. Par exemple, sur un site industriel, une attention sera portée aux installations annexes et auxiliaires pour évaluer leurs niveaux de pollution.
Finalement, la taxonomie verte concerne actuellement un peu moins d’une centaine d’activités.
En France, il existe déjà des lois qui contraignent les entreprises de plus de 500 salariés à publier leurs bilans de performance environnementale.
Cependant, avec la taxonomie verte, plusieurs acteurs vont être concernés. Tout d’abord les entreprises, en premier lieu. Des reportings financiers concernant leurs investissements durables seront exigés par les pouvoirs publics. Ce sont principalement ces données qui permettent la classification des entreprises.
Ensuite, les États sont aussi concernés, par l’émission notamment des « green bonds » qui sont des émissions d’obligations vertes.
Enfin, tous les acteurs financiers qui agissent sur les marchés et sont susceptibles d’investir dans ces domaines. Les autorités de régulation sont également concernées par la mise en place de ce système.
L’introduction récente des centrales à gaz ainsi que des centrales nucléaires a été l’objet d’une attention particulière. Dans la première mouture des textes, ces activités n’étaient pas présentes dans les activités considérées comme vertes. Cependant, lors de la validation finale du texte, elles ont finalement trouvé leur place.
Contre l’avis des ONG et de certains investisseurs, ces technologies sont désormais éligibles à la finance verte. Elles sont considérées comme œuvrant à la réduction du réchauffement climatique.
L’Union européenne défend son choix en expliquant que, pour réussir la transition énergétique à l’horizon 2050, nous avons besoin d’investissements privés colossaux. Pour ce faire, elle estime que d’offrir la possibilité d’investir dans le nucléaire ou le gaz permettra de stimuler ces apports financiers.
L’énergie nucléaire et le gaz (uniquement en période de pointe) représentent des énergies de transition intéressantes. Qu’on le veuille ou non, nous sommes quelque part dans l’obligation de les financer. C’est, en substance, le message transmis par Mairead McGuinness, la commissaire chargée de la Finance.
Néanmoins, cela est soumis à plusieurs critères, tels que l’obligation d’apporter des garanties quant à la gestion des déchets nucléaires.
En définitive, la taxonomie verte européenne est un élément de plus dans l’arsenal juridique en faveur du développement durable. La finance verte continue de se développer, cependant son impact réel dans l’économie tarde à se faire sentir.
Si ce nouveau mode de régulation évite des mesures dites de « greenwashing », il ne fait nul doute que son impact sera majeur. L’objectif d’une neutralité carbone d’ici 2050 doit passer par une démocratisation de ce genre de mécanismes économiques.
Dans un précédent article, on vous parle du récent rapport de RTE sur les Futurs Énergétiques 2050, n’hésitez pas à lire notre article sur ce sujet.