
Virginie
LEFÈVRE
Rédactrice Sirenergies
Table des matières
November 29, 2023
4
min de lecture
La société humaine actuelle dépend étroitement des énergies fossiles comme le pétrole. Du carburant pour les transports à la pétrochimie, les usages des hydrocarbures sont multiples.
Le pétrole n’est ni inépuisable ni climato-innocent. Il faut donc anticiper son déclin.
Parmi les alternatives explorées (biocarburants), le biopétrole — parfois présenté comme « le pétrole du futur » — a suscité un vif intérêt. Tour d’horizon.
Le biopétrole est un pétrole fabriqué à partir de microalgues qui se nourrissent de CO₂. L’idée, médiatisée vers 2011, a généré un réel engouement.
Par photosynthèse, des microalgues sont cultivées dans des photobioréacteurs (tubes/transparents), puis récoltées et filtrées en pâte. Cette pâte est ensuite craquée (haute T°/haute P) pour donner un pétrole très proche du brut fossile. Après hydrotraitement, on obtient des coupes d’hydrocarbures miscibles avec kérosène, essence ou gazole.
À Alicante, l’usine pilote de Bio Fuel Systems (BFS) a testé un modèle consistant à alimenter des millions de microalgues (issues de l’Atlantique et de la Méditerranée) avec du CO₂ d’une cimenterie voisine, dans ~400 tubes géants. Les liquides récoltés sont filtrés pour obtenir une biomasse destinée à des carburants bio.
Les microalgues, composantes du phytoplancton, forment une biomasse à l’origine de sédiments devenus pétrole au cours des âges. Ressource durable, elles poussent avec eau de mer + soleil, sans sols fertiles ni intrants, en bassins ou hors-sol : elles n’entrent pas en concurrence avec l’alimentaire (contrairement à certaines cultures de 1re génération).
Composées à ~60 % de sucres, elles se prêtent au butanol/bioéthanol (fermentation) pour des carburants d’algues. Elles captent le CO₂ lors de la photosynthèse, contribuant potentiellement à la réduction atmosphérique de CO₂.
Meilleure efficience photosynthétique que les plantes terrestres, croissance continue (production annuelle). Ordres de grandeur évoqués : ~6 000 L/ha pour l’huile de palme vs ~14 000 L/ha pour algocarburant (cibles industrielles jusqu’à 60 000 L/ha/an).
Le schéma actuel est énergivore (culture, récolte, extraction, craquage, hydrotraitement). Des chercheurs (ex. INRAE) questionnent la meilleure « voie de valorisation » des algues.
Le coût du biopétrole reste prohibitif : jusqu’à ~100× un carburant fossile dans les premiers bilans. Des progrès d’échelle et de procédé sont nécessaires pour viser la compétitivité.
Défis scientifiques : concilier production de lipides (souvent stimulée par le stress, qui freine la croissance) et croissance massive. Pistes : sélection variétale, génétique moléculaire, procédés d’extraction moins énergivores.
En résumé — Le biopétrole d’algues est une piste prometteuse mais encore immature. Si ses promesses technologiques se confirment (rendements, coûts, bilan énergétique), il pourrait devenir une alternative intéressante dans un bouquet de solutions bas carbone. À suivre, aux côtés d’autres leviers (électrification, hydrogène, biocarburants avancés).
À lire aussi : Peut-on alimenter tout un pays en énergies renouvelables ?